PARTIE 3/3

Salut à toi, la forme? 

Pour rappel, cet article est le troisième d’une série sur l’histoire de l’Irezumi. 

Tu peux retrouver ici : la partie 1 et la partie 2.

L’évolution de l’Irezumi du 17ème siècle au 21ème siècle

Pour connecter les points entre le shogunate du 17ème siècle et le 21ème siècle, faisons un tour d’horizon rapide sur ce qu’il s’est passé durant ces 400 années. 

Malgré la prohibition et la dictature, le tatouage commencera à fleurir sur l’archipel.

Soutenu par l’explosion de l’art nippon. 

Le marché de masse de l’art rend les œuvres accessibles au grand public.

Cette ère signe l’avènement de l’impression sur bloc de bois, servant à faire les estampes. 

Le Japon développe, à cette période, un renouveau dans son art et gagne en raffinement. 

Le courant Ukiyo-e en est l’illustration la plus parlante. 

Je te mets juste en dessous l’image de ce qui est, je pense, l’estampe la plus connue au monde. 

La grande Vague de Kanagawa, du grand maître Hokusai. 

Magnifique.

Le niveau de dessin gagnant en qualité, le niveau de tatouage en fera de même.

Petit à petit s’esquisse le style graphique de l’Irezumi tel qu’on le connaît aujourd’hui.

Il est important de noter qu’à cette époque est traduit un livre chinois extrêmement important pour l’histoire de l’Irezumi. 

La roue tourne pour l’Irezumi grâce au Suikoden

Le Suikoden. (Au bord de l’eau en Français, de Utagawa Kuniyoshi.)

Il relate d’un ton épique les exploits de cent huit bandits, révoltés contre la corruption du gouvernement et des hauts fonctionnaires de la cour de l’empereur.

Ce livre résonnera très fort avec la population japonaise oppressée par le shogunate. 

Comme tu peux le voir sur l’image du milieu, une partie de ces brigands est fortement tatouée. 

Le livre étant un franc succès, les tatouages redeviennent à la mode chez la jeune génération en soif de liberté.

Kuniyoshi - 108 Heroes of the Popular Suikoden (S2

A partir de ce moment-là, l’intérêt pour l’Irezumi n’a cessé de croître jusqu’à nos jours, malgré la prohibition. 

A la fin du 19ème siècle des étrangers viennent se faire tatouer chez les plus grands maîtres tatoueurs. 

Et pas seulement des marins ou des voyageurs errants. 

On parle de grandes pontes royales. 

Comme le roi anglais Edward VII et ses fils par la suite qui se feront également tatouer des dragons sur le bras. 

Au grand désarroi de la classe dirigeante japonaise…

… Incapable de comprendre pourquoi des personnes d’une telle importance s’adonnaient à une pratique de plébéien. 

Malgré tout, la prohibition reste en place jusqu’à l’occupation Américaine.

L’occupation Américaine

Le changement de mentalité s’amorce doucement suite à la demande d’un officier Américain pour assouplir la législation sur le sujet.

Les marins avaient pour habitude de se faire tatouer des flash lors de leur visite dans d’autres pays. 

Et l’art japonais semblait fortement attirer les occidentaux. 

Le gouvernement japonais cède et rend le tatouage de nouveau légal. 

À la condition près qu’il refusera de donner un statut légal aux tatoueurs.

Les laissant encore une fois dans une zone grise, qui bien sûr profitera à la mafia. 

Et ce, jusqu’en 2020, ou l’État japonais a enfin reconnu la profession.

Lui accordant ENFIN un statut juridique. 

Malgré des avancées, les stigmatisations perdures

Malgré tout, la stigmatisation sur les tatouages continue à l’heure actuelle. 

Certains endroits sont interdits aux personnes tatouées. 

Même pour un étranger.

Les bains publics, certaines plages ou encore les Onsens (sources thermales) par exemple, affichent des pancartes assez explicites. 

Je te mets une image juste en dessous.

Japan tourism agency asking onsen owners to relax tattoo policies - News -  Stripes

Certains jobs peuvent également être inaccessibles aux personnes tatouées. 

Par exemple, présentateur à la télé ou modèle.

Mais il y a plus embêtant dans la vie quotidienne, comme certains appartement qui sont interdis aux personnes tatouées. 

Sur les fiches de renseignements personnels, il y a une ligne pour demander si les personnes sont tatouées ou non.

Si ça c’est pas de la stigmatisation, je ne sais pas ce que c’est.

Fort heureusement les choses s’améliorent doucement et les mentalités changent avec l’arrivée des nouvelles générations. 

Même si encore en 2021, bon nombre de japonais décident de ne pas se faire tatouer car ils ont conscience qu’être tatoué, c’est choisir un style de vie différent. 

Fort heureusement, que ce soit en occident ou en asie, beaucoup d’amoureux de cet art ancestral continuent d’oser se faire tatouer afin de faire vivre la tradition…

Enfin… tradition…

Le passage du temps emporte tout, même les méthodes les plus traditionnelles.

Au tout début de cette série je t’ai dit que ‘Irezumi’ était le nom donné en occident au tatouage traditionnel japonais. 

Mais soyons honnête, on ne peut plus appeler ça “traditionnel”. 

Et comme dit l’idiome : “On arrête pas le changement”. 

Le passage du temps engouffre tout…

… même les méthodes les plus traditionnelles et conservatrices. 

Tebori – Horisumi – Kian Forreal

Voilà à quoi ressemblait une séance traditionnellement, même si je pense que les deux posent pour la photo. 

Qu’importe, cela te donne une idée. 

Très souvent le client était allongé sur une petite couchette avec un futon et un traversin, pas à même le tatami. 

Le tatoueur procédait ainsi à l’insertion de l’encre sous la peau en utilisant un outil appelé le ‘Tebori’ (voir article précédent).

L’essence même de l’Irezumi; le rouge et le noir

A la base, il n’y avait que deux couleurs dans l’Irezumi. 

A savoir le noir, qui était obtenu en utilisant comme ingrédient de base des cendres de bois de pins. 

C’est une encre qui est encore utilisé aujourd’hui en calligraphie pour sa pigmentation de noir intense; l’encre Nara. 

J’ai pas encore eu l’occasion de mettre la main dessus, mais dès que je peux m’en procurer j’en ferai une vidéo de test, parce que l’encre est incroyable. 

J’en ai pas encore trop parlé sur ma chaine, mais je suis un fan d’encre de chine. 

C’est pour moi le plus beau noir qui existe. 

Aucun feutre n’arrivera jamais à la cheville de l’encre de Chine. 

Bref, je digresse. 

La seconde couleur de base est le rouge, qui est associé au soleil sur l’archipel. 

Au Japon, les enfants colorient le soleil en rouge dans leurs dessins, pas en orange ou jauna comme chez nous. 

C’est une couleur qui a une importance cruciale dans l’Irezumi. 

Si tu vas voir des photos d’Irezumi, tu vas très vite te rendre compte de la prévalence du rouge et du noir dans cette discipline. 

Bien évidemment, toutes les nuances de ces couleurs étaient utilisées pour pouvoir complexifier le tatouage.  

L’arrivé d’encre de tatouage de différentes couleurs

Autour du 18ème siècle, des couleurs supplémentaires sont venues s’ajouter à la palette des tatoueurs, à l’ère Meiji (1868-1912).

Le bleu-vert, le jaune et le blanc font leur apparition. 

Le jaune sera dès lors rattaché à la terre et à la religion, plus précisément au bouddhisme. 

Le blanc, lui, sera utilisé avec parcimonie pour faire les yeux des dragons et autres créatures. 

C’est encore le cas aujourd’hui. 

Puis, à la fin du 20ème siècle, les produits de synthèses permettent de créer des nuances qui ne sont pas faisables naturellement, comme le orange et le violet. 

Ces couleurs n’existaient pas traditionnellement dans l’Irezumi mais se sont installées tout de même, permettant au style de se réinventer. 

Rien que pour ça, l’Irezumi ‘traditionnel’ n’existe plus en tant que tel. 

Le style graphique lui a demeuré, avec une appropriation propre à chaque tatoueur. 

Surtout avec l’arrivée du dermographe qui a permis aux tatoueurs de créer des œuvres plus complexes, plus rapidement et plus précisément. 

D’ailleurs le Tebori n’y aura pas résisté. 

Seule une poignée d’amoureux de cet art ancestral continue de le pratiquer. 

Et bien que l’Irezumi ne soit plus aussi traditionnel qu’il le fût, il reste malgré un art absolument fascinant. 

Les sujets, les couleurs, les postures, le dynamisme présent dans le tatouage et les fonds qui permettent de faire ressortir le sujet du tatouage. 

Les fonds sont une des raisons de l’impression de mouvement dans les compositions

Ils sont également à l’origine de l’effet de contraste qui permet de faire ressortir le sujet. 

Et cela nécessiterait une suite d’articles entière. 

Chose que j’ai faite dans une série de mails, envoyée aux abonnés de ma newsletter. 

Pour ne pas rater les prochaines séries d’e-mail secrètes, c’est par ici pour s’inscrire! 

Allez, on se retrouve dans le prochain article! 

La bise,

Miennu.

Les articles qui peuvent également t'intéresser

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *